C'est le moyen pour moi d'échanger sur la Chine, de faire partager mes voyages en Chine, des lectures sur la Chine, des analyses, des impressions, d'aller au-delà des peurs qu'inspire ce grand pays si entreprenant en essayant de comprendre ses propres craintes, ses propres défis mais aussi de pointer les questions qu'il soulève. Nous aurons peut-être ainsi l’occasion de faire un bout de chemin ensemble.
Nous devons à la Chine quatre inventions majeures : la poudre à canon, la boussole, l’imprimerie et le papier. C’est dans ce pays où l’idée d’entrelacer finement des fibres, de les lier ensemble avec de la colle pour en constituer une sorte de toile à la surface unie, est apparue précocement. L’invention du papier allait permettre aux Chinois de faire de l’écrit l’une des valeurs fondamentales de leur civilisation comme l’a révélé en 1900 la grotte de Dunhuang (Gansu) murée vers l’an 1000 pour protéger des milliers d’anciens manuscrits.
On attribue traditionnellement cette invention au Chinois Cai Lun, chef des ateliers impériaux, mort en l’an 121 après J.-C. Mais on sait aujourd’hui que cela est inexact. Les découvertes archéologiques chinoises récentes ont démontré que le papier support de l’écriture était connu en Chine depuis au moins quatre siècles, au temps de l’édification de la Grande Muraille (IIIe-IIe siècles avant J.-C.).
Au début, le papier était composé de fibres végétales broyées, principalement du chanvre. Il y avait aussi du lin, du bambou et de l’écorce de mûrier. Il semble que Cai Lun a amélioré les techniques de fabrication Il a probablement ajouté des fibres tissées provenant de morceaux de chiffon. Il aurait aussi réussi à imposer le papier comme « substitut » à la soie, beaucoup plus chère, et aux planchettes de bambou, beaucoup plus lourdes..
Ainsi, la Chine est passée du IIe siècle avant J.-C. au IIe siècle après J.-C. d’un papier de fibres ligneuses (bois râpé, écorces et fibres végétales) au papier de chiffon. La Chine a donc connu une évolution opposée à celle de l’Occident qui, après avoir utilisé « le papier chiffon » hérité précisément de la Chine, réinventera seulement au milieu du XIXe siècle, sous la pression de la pénurie de matières premières, le « papier de bois ».
En chinois, papier se dit zhi. À l’écrit, le caractère qui le désigne est composé de deux éléments dont le premier signifie soie (si), un clin d’œil à leur lien historique.
Outre l’écriture, le papier servait aussi à faire des vêtements, des chaussures, et encore récemment, il remplaçait les vitres des fenêtres.
De la Chine, la découverte du papier a suivi un double cheminement : l’un en direction de l’Extrême-Orient, où l’on fabriquait du papier en Corée vers 600 et au Japon vers 610, l’autre en direction de l’ouest en longeant le pourtour méridional de la Méditerranée pour finalement atteindre l’Europe au XIIe siècle.
EN SAVOIR PLUS :
La fabuleuse histoire du papier, Michel Vernus, éd. Cabédita, coll. Archives vivantes, 2004.
Sur la route du papier, Erik Orsenna, 2012, éd. Stock.
À voir : le Musée de Turfan, dans la province autonome du Xinjiang, qui abrite des papiers datant du IVe siècle, soit neuf cents ans avant son apparition en Europe.