C'est le moyen pour moi d'échanger sur la Chine, de faire partager mes voyages en Chine, des lectures sur la Chine, des analyses, des impressions, d'aller au-delà des peurs qu'inspire ce grand pays si entreprenant en essayant de comprendre ses propres craintes, ses propres défis mais aussi de pointer les questions qu'il soulève. Nous aurons peut-être ainsi l’occasion de faire un bout de chemin ensemble.
Selon Jean-Luc Domenach, la Chine est sortie du totalitarisme pour entrer dans une « autocratie développementale ».
« Contrairement à des stéréotypes bien établis, le régime politique chinois s’est à la fois renouvelé et consolidé. Le fait essentiel est la sortie, non pas du communisme, mais du communisme totalitaire : le pays demeure certes dirigé de façon dictatoriale par un Parti communiste, mais cette dictature se donne moins de pouvoir sur les hommes et sur les choses qu’autrefois le régime maoïste. […]
Deng Xiao Ping accordait la priorité au développement économique dans le but de sauver le régime communiste et de l’inscrire dans la durée. Mais pour remettre au travail la population, il fallait mettre fin à son étouffement. Le passage du totalitarisme à ce que l’universitaire américain Minxin Pei appelle une « autocratie développementale » a donc entrainé une transition de la terreur de masse à une répression plus sélective et à un contrôle plus souple.
Après trois décennies, les résultats sont considérables. Les prisons et les camps de travail n’abritent aujourd’hui qu’une faible minorité de prisonniers politiques – probablement quelques dizaines de milliers si l’on tient compte des détenus provenant de plusieurs sectes dont le Falungong : autant de trop certes mais cela ne place plus la Chine parmi les leaders mondiaux de la répression. Le goulag chinois n’a pas été démantelé et la situation varie suivant les lieux entre le très mauvais, le mauvais et le presque correct mais l’arbitraire recule et l’espace d’application de la législation officielle s’élargit. A titre général, on assiste à une explosion de l’usage du droit : le nombre des jugements a presque triplé entre 1987 et 2003 et celui des juges est passé de 70 000 à 180 000 entre 1988 et 2004. Les tribunaux et les parquets cherchent à s’affirmer face à la Sécurité et tous les procès ne sont plus joués d’avance, d’autant qu’a été promise aux avocats une loi assurant l’immunité juridique pour leurs déclarations en audience. L’efficacité des procès augmente en matière de conflits du travail. De même les recours des citoyens contre l’Etat – et donc les administrations locales – se verront prochainement traités de manière plus impartiale car ils seront jugés par des tribunaux éloignés des cours locales. La peine de mort, hélas très populaire dans l’opinion, demeure pratiquée à une échelle inconnue dans tout autre pays du monde, quoique moindre depuis que chaque décision doit être confirmée par la Cour suprême, un signe positif est que les autorités chinoises signalent comme un succès la diminution du nombre des exécutions en 2006. D’après Amnesty International, il s’élèverait encore à 7 500 – 8 000 : c’est énorme, mais la tendance est clairement à la baisse. En principe interdite, la torture n’a pas disparu, mais elle est de plus en plus souvent punie, de même que l’abominable commerce des organes des condamnés à mort exécutés, qui est une des hontes de la Chine contemporaine. »
En 2013, le nouveau président chinois Xi Jinping a aboli les camps de rééducation.
Notre conseil : Se rappeler le jugement de Lucien Bianco (2007) : « L’évolution de la Chine depuis un quart de siècle est aussi différente de l’ère maoïste que l’Empire de la Révolution française ».
Sources :
- Jean-Luc Domenach, La Chine m’inquiète, 2012 ( ?)