Certains parlent du Massacre de 1989 comme d’un événement qui appartiendrait au passé. Certes, le pouvoir chinois a tout fait pour qu’il soit effectivement rangé dans les oubliettes de la bureaucratie communiste, mais, en fait, l’actualité du 4 juin se rappelle constamment à nous. Le 2 mai dernier, par exemple, nous apprenions que le prisonnier Miao Deshun serait bientôt libéré de prison. Condamné à vie en 1990 pour sa participation aux manifestations du printemps démocratique de la place Tiananmen, sa peine vient d’être commuée et il devrait être libéré le 15 octobre prochain. L’on apprend ainsi, au hasard des petites nouvelles qui s’échappent de Chine, qu’un prisonnier, que l’on croit à chaque fois être le dernier prisonnier de cette époque va être libéré… jusqu’à ce que l’on apprenne le nom d’un nouveau malheureux qui sera peut-être libéré dans deux, trois ans, et dont on ne connaissait même pas l’identité aujourd’hui.
Début de la reproduction en ma possession en format accordéon (titre calligraphié en caractères sigillaires), présenté ci-dessous en neuf photos, mais qui, en réalité, est continu.
Achetée l'an dernier pour quelques yuans dans un village du Sud de la Chine, cette vieille reproduction sur tissu cartonné, au format accordéon, d'un ancien rouleau grandeur nature, m'avait quelque peu intriguée et surtout ne m'avait pas dévoilé tous ses secrets. Quelques recherches plus tard, ma curiosité est comblée !
"Le Jour de Qingming au bord de la rivière" est un tableau remarquable à plusieurs titres. D'abord par sa taille : 24,8 cm de hauteur pour 5,28 m de longueur ! L'original est un rouleau à main horizontal qui se lit de droite à gauche. Il faut donc "marcher" pour découvrir la ville qu'il représente. On y accède par sa campagne, puis on longe la rivière (plutôt le canal) qui la traverse. On emprunte alors ses ponts et ses ruelles pour découvrir la foule d'artisans, de commerçants, de paysans qui l'animent et enfin, on franchit sa porte monumentale pour en ressortir, croisant quelques caravanes chargées de denrées en provenance de la route de la Soie.
Impossible donc de saisir le tableau d'un seul regard. Ce serait ne rien voir de la vie grouillante de cette cité (représentée le jour de la fête de Qingming, la fête des morts, très animée semble-t-il !), ne pas repérer les 814 personnages, 60 animaux, 28 bateaux, 20 véhicules en tous genres, 170 arbres et 30 bâtiments qui composent le tableau. Ce serait aussi ne rien comprendre à cette ancienne capitale de Bianjing (devenue Kaifeng) au temps des Song du Nord, représentée sur cette peinture du XIIe siècle généralement attribuée au peintre Zhang Zeduan (1085-1145).