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Jeu vieux d’au moins 4000 ans, d’origine totalement chinoise, le jeu de go (weiqi, en chinois) fait l'objet de parties interminables à la télévision chinoise (CCTV) qui fait même appel à des experts pour expliquer les intentions des joueurs. Le plus ancien jeu abstrait de stratégie combinatoire du monde a récemment fait parler de lui puisque le meilleur joueur au monde a été battu par un programme d'intelligence artificielle.

(source: La souplesse du dragon, Cyrille Javary, Albin Michel, 2015) 

Le but du jeu est d’encercler les pions adverses avec les siens.

Vaincre, l’objectif naturel de tous les jeux, ne signifie pas au weiqi réduire l’adversaire à merci, tuer son roi ou prendre tous ses pions. Le vaincu a certes perdu la partie mais il n’a perdu ni ses troupes, ni sa face parce que le weiqi est un jeu de construction de territoires, d’organisation d’espaces et non un duel dans un champ clos sans autre issue que le mat, la mort de deux adversaires.

Le plateau aujourd’hui est une feuille de papier ou de nylon. Il est l’épure parfaite de la modélisation énergétique chinoise. Il comporte un maillage de 19 x 19 lignes. Leurs croisements construisent 361 intersections, un nombre égal à celui des points d’acupuncture dans le corps humain et à peu près à celui des jours de l’année. Les pièces sont noires et blanches (couleurs du Yin et du Yang) et sont souvent en verre dépoli, toutes identiques. C’est uniquement leur placement, leur insertion dans le déroulement de la partie qui donne à ces pierres noires et blanches comme le Yin/Yang une valeur spécifique, vitale ou secondaire, potentielle ou secondaire, en fonction de la situation d’ensemble, selon Cyrille Javary (dans La souplesse du dragon, Albin Michel). Une fois posée, les pierres resteront jusqu’à la fin de la partie où elles ont été posées (sauf si elles sont capturées) L’objectif essentiel n’est pas de capturer des pièces adverses mais de délimiter et sécuriser des territoires, c’est-à-dire des intersections vides entièrement entourées par les pierres d’un même camp. Voici quelques règles déroutantes pour un Occidental : «Si l’adversaire a attaqué dans un coin, répondez ailleurs » , reflet d’une habitude des Chinois de préférer l’oblique au direct. Cette stratégie multipolaire et disséminée est d’autant plus subtiles à mener que le weiqi est un jeu où tout se passe sous les yeux des joueurs. Il y a de nombreuses applications chinoises de ce jeu sur le plan géopolitique. Le grand stratège chinois Sun Zi (544-496), dans sonArt de la guerre, explique l’action victorieuse non par des batailles décisives mais par une constante évaluation des conditions et de leurs évolutions.